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Journal intime de guérison

  • Amine
  • 19 déc. 2016
  • 6 min de lecture

Imaginez : je suis assis en classe, je ne peux m'empêcher de bouger, de me balancer sur ma chaise. Là l'adulte devant moi me demande d'arrêter, de "me tenir tranquille".

Cette situation anodine, nous l'avons peut-être vécue. Et pas qu'une fois, plutôt des centaines de fois.

Observons ce qu'elle a pu créer. Pour nous tous. Car elle n'est peut-être pas si anodine...

Dans le simple fait de demander à un enfant de ne plus bouger, on l'invite à restreindre quelque chose qu'il fait naturellement pour s'autoréguler.

Si je me balance sur ma chaise quand je suis en classe c'est pour rétablir un équilibre physiologique (la circulation sanguine du corps par exemple) qui est entrain d'être perturbé car cela fait 5h que je suis assis et mon corps n'est pas fait pour cela.

Cela a lieu totalement spontanément et inconsciemment, c'est un mouvement de notre intelligence corporelle et il est bénéfique. Bien sûr la plupart du temps nous ignorons que le corps s'autorégule et nous ignorons comment il le fait...Je ne l'ai moi même découvert qu'il y'a peu...

Il le fait pourtant de plein de manières différentes : balancer mes jambes quand on est assis, bouger sur ma chaise, etc. Tout ces mouvements sont des réflexes qui permettent de décharger des tensions (je ne rentrerai pas dans les détails physiologiques dans cet article), en bref, de maintenir un équilibre global dans un environnement qui me met en déséquilibre (physiologique, émotionnel, psychique).

Mais si je n'ai pas le droit de le faire alors on m'invite à entrer en conflit avec moi-même, avec mes propres processus régulateurs. Je dois me contraindre à ne pas bouger alors que j'en ai une folle envie. Il n'est pas difficile d'imaginer qu'en moi, cela créé une tension.

A partir de là, il y'a globalement deux scénarios possible : soit j'accepte cette tension, la contrainte et la fait mienne, soit je ne l'accepte pas et je suis exclu (de la classe, du groupe, de l'école etc.)

Je développerai le premier scénario, car c'est celui que j'ai vécu. J'admire secrètement ceux qui optent ou qui ont opté pour la deuxième solution, car, sûrement totalement inconsciemment, il protège leur nature profonde.

Donc, par souci d'être accepté par le groupe et surtout par l'autorité en vigueur, je vais me conformer à la demande de ne pas bouger, voire, je vais même tenter d'y répondre moi-même les prochaines fois, en anticipant autant que faire ce peut ce qui représente "une mauvaise chose".

Par ignorance et par peur du rejet (je suis enfant et j'ai besoin de me sentir dans le groupe, adapté), je me construis une personnalité qui va mener ce conflit contre toutes ces choses que je fais inconsciemment, spontanément. Cette personnalité a pour objectif d'anticiper sur tout ce qui pourrait représenter une cause de rejet. La peur et l'anticipation vont de pair.

Selon l'énergie que j'ai à ma disposition et la loyauté que je ressens envers mon groupe ou l'autorité, le conflit que je mène peut se transformer en croisades, contre toutes ces choses qui ne sont apparemment pas "correctes".

Cette personnalité que je me construis se sent emprunte d'une mission de répression, de conquête et finalement de pouvoir. Sur quoi ? sur tout ce qui se passe en moi et que je ne maîtrise pas, et qui peut potentiellement représenter un danger pour moi et pour les autres (du moins c'est ce que je crois, c'est ce qu'on m'a dit). En somme, ma vie.

Ce conflit, s'il s'étend encore (et cette personnalité, souvent orgueilleuse, car en fait profondément humiliée, va l'étendre à toute chose si elle en a l'énergie), va amener au refoulement de tous mes réflexes spontanées, les considérant comme une tare : cela peut aller du simple balancement jusqu'à l'envie d'aller aux toilettes, cela va également concerner mes émotions que je ressens et toutes ces choses simples qui m'aident à répondre aux besoins nécessaires à ma vie. Vont ainsi être refoulés les uns après les autres : mes mouvements physiques spontanés, puis mes mouvements émotionnels, puis mes pensées et finalement mon intuition.

A ce stade, l'Homme, ou celui que je suis, est devenu un pur robot qui calque tous ses comportements sur un idéal qu'il imagine être "ok", "parfait", ou qu'on lui dicte. Dépourvu de toute spontanéité et par souci d'être accepté par son groupe social : par peur. Cette peur, si énorme pour un enfant (quoi de plus important pour un enfant que d'être accepté ?), continue d'être vécue jusqu'à l'âge adulte..

Dans le monde adulte, cette habitude de conflit va devenir de plus en plus performante, à travers tout plein d'outils techniques qui peuvent être utilisés pour lutter contre la vie (les médicaments en sont un exemple). On refoulera les mouvements, les réactions du corps, comme la douleur mais plein d'autres choses encore plus subtiles. Les personnalités dominantes sont emprunts d'orgueil, qui cache une humiliation profonde. Cet orgueil sépare les uns des autres, encourage la critique, le repli, l'isolement, etc.

Désormais, à ce stade de la description, c'est important de ressentir de la compassion, beaucoup de compassion et de bienveillance envers cette part de nous même qui a le contrôle, et ce, malgré tous les dégâts occasionnés. Car la compassion et la bienveillance sont les clefs de notre liberté. Le conflit nourrit le conflit. La compassion et la bienveillance ne le nourrissent pas. Pour apaiser l'orgueil et l'humiliation qui en est la racine, on ne peut qu'aimer, aimer fort.

Comme tout le groupe social fonctionne comme cela, on se renforce les uns les autres dans ce schéma de comportement, on se congratule quand on trouve des moyens de refoulement encore plus efficaces. La recherche scientifique est mise au service de ce mode de vie (ou de mort ?), tout est fait pour refouler la spontanéité de la vie. Nous devenons ultra performants là-dedans (comme tout ce à quoi nous nous entraînons nuit et jour), mais également ultra conformes.

Les mots d'ordre : contrôle et maîtrise.

La vie elle-même est devenue l'ennemi. Tout ce qui n'est pas prévu, prévisible ou attendu devient un danger, il faut l'éliminer. La maladie est vue comme une horreur, les petits boutons aussi, les choses qu'on ne comprend pas doivent être réduites à néant. La peur est le moteur de tout cela. Il faut éliminer toute possibilité d'imprévu et de surprise. Tout contrôler.

Et tout cela est dû à ce que j'ai un jour fait, totalement inconsciemment, et qui a été fortement rejeté, réprimé.

Pourtant l'inconscient c'est la vie, l'inconscient est notre ressource principale de vie, de créativité.

Que faisons nous lorsque nous faisons un bête brainstorming ? Nous faisons appel à l'inconscient...

Maintenant, en entreprise, des gens viennent nous réapprendre à être créatif. La boucle est bouclé. Dans la prison, on vient vous apprendre à être libre.

Ô, quelle grande confusion qui nous fait prendre pour ennemi notre meilleur allié...Et qui nous fait entrer dans un conflit qui nous bouffe, parfois jusqu'au cancer.

Tout a débuté par une simple injonction : "tiens toi droit !" ou "cesse de te balancer sur ta chaise !". Et cela finit en drame individuel, sociétal et écologique.

Heureusement il y'a une voie d'issue à ce piège monumentale...

Renouer avec la vie.

Renouer avec notre inconscient. Et faire confiance à notre spontanéité.

Reconnaître et accepter ce conflit, nous en libère. Après tout c'est une expérience, et elle semble nécessaire à l'humain puisque nous la vivons en masse...

Cessons de nourrir la peur pour entrer dans l'amour.

En retrouvant confiance dans nos processus d'autorégulation, ceux là qui sont inconscients, qui sont absolument magnifiques. Fruits de milliards d'années d'évolution de la vie.

Si j'éternue c'est parce qu'un réflexe protecteur m'y poussent. Si je cligne des yeux c'est pour me protéger d'une poussière. Si je suis en colère c'est que j'ai un besoin à exprimer et si je suis triste c'est que j'ai quelque chose qui me tient à cœur à exprimer. Me reconnaître et m'accepter dans ces vécus simples est primordiale. Je suis en vie.

En comprenant tout cela, en observant tous les jours ce que je vis, à chaque instant, et en acceptant de laisser faire et être, tout en s'en rendant responsable, le conflit qui se déroulait en moi s'apaise. Je comprends que je suis entre de bonnes mains, main-tenant et à chaque instant, mes propres mains et celle de dieu, la vie, l'inconscient, peu importe le nom.

Le plus dur est d'accepter, car j'ai passé tant et tant d'années à m'entraîner à lutter qu'accepter est un réel défi. Mais peu importe. Je dois renouveler mon acceptation, à chaque fois que je ressens une résistance, une lutte. C'est simplement une épreuve d'amour et de bienveillance envers moi-même.

Au début, il est normal que ce que je laisse s'exprimer spontanément le fasse de manière démesurée.

En effet, n'importe quelle chose, après tant d'années de refoulement, a un besoin énorme d'expression et de reconnaissance : une colère énorme qui jaillit du fin fond des entrailles, une tristesse immense qui envahit mon être, des tremblements de peur qui me prennent parce que je m'autorise à les vivre, des mouvements étranges et incohérents...tout cela va s'atténuer à mesure que le besoin d'expression et de libération est compris et satisfait et comme toute chose qu'on s'autorise à faire, ça devient de plus en plus subtile avec le temps.

Et petit à petit nous nous retrouvons en retrouvant : notre posture naturelle, nos mouvements naturels, nos réactions émotionnelles spontanées, nos désirs, nos pensées et ultimement notre intuition.

Nous vivons tout cela spontanément, nous percevons plus clairement le sens des choses, nous nous sentons apaisés, moins en résistance, moins en constante tension. Et plus joyeux. Nous pouvons donner ce que nous avons de plus beau à donner : nous-mêmes, vrais et authentiques, imparfaits et parfaits. Nous retrouvons notre liberté et nous vivons, tout simplement.

Voilà en somme ce que je nomme "guérison".

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